Thomas d'Aquin - Celui qui aime n'a pas besoin de connaître en détail ce qu'il aime - I-II.q27a2ad2
Il faut davantage pour la perfection de la connaissance que pour celle de l'amour. Quelque chose est requis pour la perfection de la connaissance qui n'est pas requis pour la perfection de l'amour. En effet, la connaissance relève de la raison, dont [le rôle] est de distinguer ce qui ne fait qu'un dans la chose (rem), et de rapprocher (componere) les éléments divers en les comparant. C'est pourquoi il est requis pour une connaissance parfaite (ad perfectionem cognitionis) que l'homme connaisse dans le détail tout ce qui est dans une chose (re) : comme ses parties, ses puissances, ses propriétés. Mais l'amour est, dans la puissance appétitive, ce qui regarde la chose (rem) selon qu'elle est en elle-même. De sorte qu'il suffit pour la perfection de l'amour (ad perfectionem amoris) que la chose soit aimée selon qu'elle est appréhendée en elle-même. Il arrive alors qu'une chose soit aimée plus qu'elle n'est connue : en cela que quelque chose peut être aimé parfaitement (perfecte amari) même si elle n'est pas parfaitement connue (perfecte cognoscatur). C'est ce qu'on voit nettement pour les sciences que certains aiment, bien qu'ils n'en aient qu'une connaissance sommaire : ils savent, par exemple, que la rhétorique est la science qui permet à l'homme de persuader, et c'est cela qu'ils aiment en elle. Et cela peut être dit de manière similaire à propos de l'amour de Dieu. (Somme, I-II.q27a2ad2) |
Aliquid requiritur ad perfectionem cognitionis, quod non requiritur ad perfectionem amoris. Cognitio enim ad rationem pertinet, cuius est distinguere inter ea quae secundum rem sunt coniuncta, et componere quodammodo ea quae sunt diversa, unum alteri comparando. Et ideo ad perfectionem cognitionis requiritur quod homo cognoscat singillatim quidquid est in re, sicut partes et virtutes et proprietates. Sed amor est in vi appetitiva, quae respicit rem secundum quod in se est. Unde ad perfectionem amoris sufficit quod res prout in se apprehenditur, ametur. Ob hoc ergo contingit quod aliquid plus amatur quam cognoscatur, quia potest perfecte amari, etiam si non perfecte cognoscatur. Sicut maxime patet in scientiis, quas aliqui amant propter aliquam summariam cognitionem quam de eis habent, puta quod sciunt rhetoricam esse scientiam per quam homo potest persuadere, et hoc in rhetorica amant. Et similiter est dicendum circa amorem Dei.. |
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1. La traduction originale de la première phrase a été laissée pour montrer son approximation.
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