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Thomas d'Aquin - DeMalo.q10a1- EN COURS - Pourquoi l'envie est-elle une faute ?

Tout acte

  • qui relève de la fuite
  • et dont l'objet est un bien,

n'est convenable

  • ni quant à sa matière
  • ni quant à son objet,

et c'est pourquoi tout acte de cette sorte est un péché par son genre, ainsi

  • haïr le bien, le repousser et s'en attrister,
  • parce que dans l'intelligence, c'est aussi un vice de nier le vrai.

Il ne suffit cependant pas, pour qu'un acte soit bon,

  • qu'il implique la poursuite du bien ou la fuite du mal,
  • si ce n'est la poursuite du bien convenable, et la fuite du mal qui lui est opposé :

pour le bien, dont la perfection tient à la plénitude et à l'intégrité de la chose, sont requis plus d'éléments que pour le mal, qui résulte de chaque déficience singulière, comme le dit Denys dans Les Noms Divins (IV, 30).

Or l'envie implique une tristesse qui vient du bien ; aussi est-il patent qu'elle est de par son genre un péché.

(DeMalo.q10a1)

Omnis actus

  • ad fugam pertinens
  • cuius obiectum est bonum,

est non conveniens

  • suae materiae
  • vel obiecto;

omnis talis actus ex suo genere est peccatum; sicut

  • odire bonum et abominari bonum et de ipso tristari;
  • quia etiam in intellectu vitium est negare verum.

Non tamen sufficit ad hoc quod actus sit bonus,

  • quod importet prosecutionem boni vel fugam mali
  • nisi sit prosecutio boni convenientis, et fuga mali quod ei opponitur;

quia plura requiruntur ad bonum, quod perficitur ex tota et integra causa, quam ad malum, quod relinquitur ex singularibus defectibus, ut Dionysius dicit V cap. de Divin. nominibus;

invidia autem importat tristitiam ex bono. Unde patet quod ex suo genere est peccatum. 

 


 

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Thomas d'Aquin - La peur provoque une dépression de l'âme

La crainte ajoute à la fuite (...) une certaine dépression de l'âme à cause d'un mal difficile [à repousser].

(Somme, Ia-IIae, q. 25, a. 1, c.)

Timor addit supra fugam (...), quandam depressionem animi, propter difficultatem mali.

 

Chez Thomas le mal suscite en nous une passion de haine (ne pas aimer), nous n'aimons pas le mal. En conséquence nous fuyons le mal (la fuite étant une autre passion). Si le mal ne peut être évité, nous le subissons et en ressentons douleur ou tristesse.

Qu'en est-il de la peur ? La peur se greffe sur la fuite du mal lorsque cette fuite se révèle difficile et qu'elle pourrait ne pas aboutir de sorte que le mal finisse par nous atteindre. L'effet de la peur, ici, est de ralentir la fuite, voire même de la rendre impossible tant le mal nous paraît grand, indiscernable, difficile à éviter. 

Au contraire, elle peut aussi nous amener à être happé dans la fuite, dans un mouvement irrépressible.

C'est ainsi que Thomas utilise le mot dépression qui signifie en latin un mouvement de pression du haut vers le bas, le fait de rabaisser quelqu'un et, plus généralement, tout mouvement d'abaissement. On  retrouve aujourd'hui encore cet usage lorsqu'on parle de la dépression d'un terrain pour désigner un endroit enfoncé. De même en météorologie.

L'image fonctionne alors ainsi : ou bien nous restons piégés dans cet enfoncement, ou bien nous dévalons la pente d'autant plus vite que la pente est raide.

Nous sommes sans doute ici face à l'un des premiers usages du mot pour qualifier la vie sensible de l'âme, lorsqu'elle est prise par un mouvement de descente face à un mal.

Autre part, Thomas parle d'angoisse, évoquant alors le sentiment de rétrécissement.

 

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