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Thomas d'Aquin - DePot.q3a15 - Le propre de l'agent volontaire est d'intelliger la fin afin de se mouvoir vers cette fin

Est découvert [par nous] que la volonté et la nature agissent en vue d'une fin, mais de façons différentes.

[Le cas de la nature]

En effet, comme la nature ne connaît

  • ni la fin
  • ni la raison de la fin (rationem finis),
  • ni sa relation, [c'est à dire de la relation de] ce qui est vers la fin dans la fin, [??? = ni la relation des moyens vers la fin ???]
  • elle ne peut se fixer une fin ;
  • ni se mouvoir vers la fin,
  • ou l'ordonner,
  • ou la diriger,

ce qui appartient à l'agent [qui agit] par volonté, dont c'est le propre d'intelliger

  • et la fin
  • et tout ce qui a été dit [plus haut] [= la fin, la ratio finis, la relation moyens / fin].

[Le cas de l'agent volontaire]

C'est pourquoi un agent [qui agit] par volonté

  • agit en vue d'une fin,
  • parce qu'il s'est assignée une fin
  • et il se meut lui-même d'une certaine manière vers la fin,
  • en y ordonnant ses actions.

[Le cas de la nature]

Mais la nature tend à sa fin comme mue et dirigée par un autre, pourvu d'intellect et de volonté,

  • comme cela est patent pour la flèche, qui tend vers une cible déterminée par la direction [donnée] par l'archer
  • et ainsi les philosophes disent que l'oeuvre de la nature est l'oeuvre d'une intelligence.

[Le cas de Dieu qui agit ou naturellement ou volontairement]

Mais toujours ce qui dépend d'un autre est postérieur à ce qui est par soi.

C'est pourquoi il faut que celui qui ordonne en premier vers une fin, le fasse par volonté ;

et ainsi Dieu,

  • par volonté produit les créatures dans l'être, 
  • non par nature.

Et ce n'est pas le cas du Fils parce qu'il procède naturellement du Père ; sa génération a précédé la création : parce que le Fils ne procède pas

  • comme ordonné à une fin,
  • mais comme la fin de tout.

(DePot.q3a15)

Invenitur autem agere propter finem et voluntas et natura, sed aliter et aliter.

[ ]

Natura enim, cum non cognoscat

  • nec finem
  • nec rationem finis,
  • nec habitudinem eius, quod est ad finem in finem,
  • non potest sibi praestituere finem,
  • nec se in finem movere
  • aut ordinare
  • vel dirigere;

quod quidem competit agenti per voluntatem, cuius est intelligere

  • et finem
  • et omnia praedicta.

[ ]

Unde agens per voluntatem sic

  • agit propter finem,
  • quod praestituit sibi finem,
  • et seipsum quodammodo in finem movet,
  • suas actiones in ipsum ordinando.

[ ]

Natura vero tendit in finem sicut mota et directa ab alio intelligente et volente,

  • sicut patet in sagitta, quae tendit in signum determinatum propter directionem sagittantis;
  • et per hunc modum a philosophis dicitur, quod opus naturae est opus intelligentiae.

[ ]

Semper autem quod est per aliud, est posterius eo quod est per se.

Unde oportet quod primum ordinans in finem, hoc faciat per voluntatem; 

et ita Deus

  • per voluntatem creaturas in esse produxit,
  • non per naturam.

Nec est instantia de filio, quod naturaliter procedit a patre, cuius generatio creationem praecedit: quia filius non procedit

  • ut ad finem ordinatus,
  • sed ut omnium finis.

 

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0. -- Bien noter : 

  • "Le propre de l'agent [qui agit] par volonté est d'intelliger la fin."

1. -- "il se meut lui-même d'une certaine manière vers la fin" : bien noter le quodamodo, pour Thomas c'est bien en dernier lieu la fin qui meut. Si l'agent volontaire est autre que Dieu lui-même, cet agent est, en dernioer lieu, mû par la fin (même si dans l'ordre des moyens cet agent peut se donner à lui-même telle ou telle fin intermédiaire). Pour ce qui concerne Dieu, il est naturellement sa propre fin, donc il se veut naturellement, il n'a pas besoin de se fixer sa fin. Pour l'action que Dieu porte en dehors de lui-même, par contre, il peut se proposer des fins, et c'est ainsi qu'il se meut de son propre chef vers une fin qu'il s'est à lui-même donnée, c'est le cas de la création.

2. -- Attention, ce n'est pas parce que le Fils procède naturellement du Père, que le Père ne veut pas le Fils librement. Comme le dit ailleurs Thomas ce qui est contraire à la liberté, ce n'est pas la nécessité, mais la contrainte.

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Thomas d'Aquin - DeVer.q15a1 - EN COURS - Différence intellect / raison

  • En effet, "intellect" semble désigner une connaissance simple et absolue ;
    • car on dit que quelqu’un intellige parce que, à l'intérieur, il lit en quelque sorte la vérité dans l’essence même de la chose (rei).
  • Quant à "raison", il désigne une certaine discursion
    • par laquelle l’âme humaine atteint ou parvient à la connaissance d’une chose à partir d’une autre.
  • Intellectus enim simplicem et absolutam cognitionem designare videtur;
    • ex hoc enim aliquis intelligere dicitur quod intus in ipsa rei essentia veritatem quodammodo legit.
  • Ratio vero discursum quemdam designat,
    • quo ex uno in aliud cognoscendum anima humana pertingit vel pervenit. (...)

 

  • Mais tout mouvement procède de l’immobile, comme dit saint Augustin au huitième livre Sur la Genèse au sens littéral;
  • en outre, la fin du mouvement est le repos, comme il est dit en Physique V,

et ainsi, le mouvement se rapporte au repos 

  • et comme à un principe
  • et comme à un terme.

De même aussi la raison se rapporte à l’intelligence

  • comme le mouvement au repos,
  • et comme la génération à l’être,

comme cela est patent à partir de l'autorité de Boèce citée plus haut ; elle se rapporte à l’intelligence

  • comme à un principe
  • et comme à un terme.

°°° Comme à un principe, car l’esprit humain ne pourrait pas procéder discursivement d’une chose à l’autre si son processus discursif ne commençait par quelque simple réception d’une vérité, réception qui relève de l’intelligence des principes.

Semblablement, le processus discursif de la raison ne parviendrait pas à quelque chose de certain, si ce qui est trouvé par ce processus n’était confronté aux principes premiers auxquels réduit analytiquement la raison.

Si bien que l’intelligence se trouve être le principe de la raison quant à la voie d’invention, et son terme quant à la voie de jugement.

(DeVer.q15a1)

  • Motus autem omnis ab immobili procedit, ut dicit Augustinus, VIII super Genes. ad litteram;
  • motus etiam finis est quies, ut in V Physic. dicitur.

Et sic motus comparatur ad quietem

  • et ut ad principium
  • et ut ad terminum,

ita etiam et ratio comparatur ad intellectum

  • ut motus ad quietem,
  • et ut generatio ad esse;

ut patet ex auctoritate Boetii supra inducta. Comparatur ad intellectum

  • ut ad principium
  • et ut ad terminum.

Ut ad principium quidem, quia non posset mens humana ex uno in aliud discurrere, nisi eius discursus ab aliqua simplici acceptione veritatis inciperet, quae quidem acceptio est intellectus principiorum. Similiter etiam nec rationis discursus ad aliquid certum perveniret, nisi fieret examinatio eius quod per discursum invenitur, ad principia prima, in quae ratio resolvit.

Ut sic intellectus inveniatur rationis principium quantum ad viam inveniendi, terminus vero quantum ad viam iudicandi.

 

 

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