non dans la connaissance des [principes] universels
mais dans leur application aux actes, on vient de le dire.
Et c'est pourquoi l'oubli de la connaissance universelle
ne corrompt pas ce qu'il y a de principal dans la prudence,
mais lui porte quelque empêchement, on vient de le dire.
(Somme, II-II.q47a16ad3)
Prudentia principaliter consistit
non in cognitione universalium,
sed in applicatione ad opera, ut dictum est.
Et ideo oblivio universalis cognitionis
non corrumpit id quod est principale in prudentia,
sed aliquid impedimentum ei affert, ut dictum est.
1.
Objection :les premiers principes pratiques s'imposent à nous, comment pourraient-ils s'oublier ?
Essai de réponse : Ce ne sont pas les premiers principes que nous oublions mais la science acquise à partir d'eux. Aussi bien le traducteur qui s'est permis d'ajouter le terme "principes" semble conduire à une incompréhension. Dans le corps de l'article, TH. parle explicitement de l'oubli d'un art ou d'une science, ce qui amène à penser qu'il aurait mieux valu ajouter, s'il fallait ajouter, le terme "conclusions" plutôt que le terme "principes". -- Pour ce qui concerne la prudence, on aurait ici l'oubli de la pratique du conseil. Si l'habitus de conseil est perdu, la prudence sera empêchée dans son acte principal de commandement et d'application.
Voir :
L’élection est elle‑même comme une certaine science de ce qui est déjà passé par le conseil (praeconsiliatis). (DeVer.q24a1ad17)
Où Thomas montre qu'il est tout sauf un intellectualiste de salon, c'est un homme fermement enraciné dans la réalité pratique de la vie
Ce passage est éblouissant de réalisme.
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Une prudence digne d'éloge ne consiste pas
dans la simple considération,
mais dans l'application à l'oeuvre, ce qui est la fin de la raison pratique.
Et c'est pourquoi si en cela il y a défaut, c'est au plus haut point contraire à la prudence,
parce que,
de même que la fin est ce qu'il y a de plus puissant (potissimus) dans quel que domaine que ce soit,
ainsi le défaut qui concerne la fin est le pire.
D'où la remarque complémentaire du Philosophe au même endroit, selon laquelle la prudence "n'est pas seulement avec la raison", comme [dans] l'art ; elle comporte en effet, comme on l'a dit, l'application à l'oeuvre, ce qui se fait par la volonté.
(Somme, II-II.q47a1ad3)
Laus prudentiae non consistit
in sola consideratione,
sed in applicatione ad opus, quod est finis practicae rationis.
Et ideo si in hoc defectus accidat, maxime est contrarium prudentiae, quia
sicut finis est potissimus in unoquoque,
ita et defectus qui est circa finem est pessimus.
Unde ibidem philosophus subdit quod prudentia non est solum cum ratione, sicut ars, habet enim, ut dictum est, applicationem ad opus, quod fit per voluntatem.
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1. Limpide. La recherche du bonheur ne peut être simplement théorique, elle passe par la mise en oeuvre pratique. Sans quoi l'erreur serait ici maximale.
2. Bien noter la référence à l'art, domaine loin d'être étranger à la réflexion de TH.