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Thomas d'Aquin - DePot.q3a15ad14 - Dieu agit agit non par appétit de la fin, mais par amour de la fin - SUBLIME

  • La communication de la bonté n'est pas la fin ultime, 
  • mais la bonté divine elle-même, c'est à partir de l'amour de [cette bonté] que Dieu veut la communiquer ; 

car

  • il n'agit pas à cause de sa bonté comme s'il avait l'appétit (appetens) de ce qu'il n'a pas,
  • mais comme voulant communiquer ce qu'il a ; parce qu'il agit
    • non par appétit de la fin (ex appetitu finis),
    • mais par amour de la fin (ex amore finis).

(DePot.q3a15ad14)

  • Communicatio bonitatis non est ultimus finis,
  • sed ipsa divina bonitas, ex cuius amore est quod Deus eam communicare vult;
  • non enim agit propter suam bonitatem quasi appetens quod non habet,
  • sed quasi volens communicare quod habet: quia agit
    • non ex appetitu finis,
    • sed ex amore finis.

 

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L'appétit et l'amour concerne tous les deux un bien. Mais l'appétit, dans son exercice, tend vers un bien qui n'est pas encore présent (ou totalement présent) tandis que l'amour jouit du bien présent.

Le conditionnement de notre existence humaine nous permet d'atteindre quelque chose de l'amour de l'autre mais reste dans un certain appétit dans la mesure où il est possible d'ajouter quelque chose à la perfection de cet amour. C'est pourquoi, pour nous, l'amour est à la fois une tension et un repos, un désir et une joie. Ajoutons qu'il nous est toutefois possible d'atteindre une certaine perfection dans l'amour par le moyen de l'intention. (J'ai l'heureuse surprise de découvrir quelques jours après avoir écrit cela que Thomas le dit exactement ainsi, voir ici.)

Dans le cas de ce passage, Thomas souligne que Dieu n'agit pas par désir, ce qui supposerait qu'il lui manque quelque chose, mais par amour - comme à partir d'un sommet sur lequel il est déjà et non vers un sommet qu'il souhaite atteindre. Celui qui, en quelque manière, a atteint quelque chose du bonheur n'est plus en quête mais agit à partir de lui, en surabondance.

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Thomas d'Aquin - I.q79a10ad3 - Intelligence | Intention | Raisonnement-Découverte | Jugement | Sagesse | Parole intérieure | Parole extérieure

Tous ces actes que le Damascène énumère sont une seule puissance, c'est à dire la [puissance] intellectuelle.

  1. Premièrement elle appréhende simplement quelque chose, et cet acte est dit intelligence.
  2. Deuxièmement, ce qu’elle a appréhendé, elle l'ordonne à quelque chose d'autre à connaître ou à opérer [= agir], et cela est appelé intention.
  3. Alors qu'elle persiste à chercher ce vers quoi elle tend, cela est appelé découverte par la réflexion.
  4. Alors qu'elle examine ce qui a été découvert par la réflexion pour [parvenir] à quelque chose de certain, cela est dit connaître ou faire oeuvre de sagesse (scire ver sapere) ; ce qu'est la phronèsis ou la sagesse, car "la sagesse c'est juger ", comme il est dit en Métaphysique I.
  5. Alors qu'elle tient quelque chose pour certain, comme quelque chose qui a été examiné, elle pense à comment manifester [= communiquer] cela aux autres, et cela est la disposition de la parole intérieure (intrioris sermonis) ;
  6. de quoi procède la parole extérieure (exterior locutio).

Et en effet toute différence dans les actes ne se diversifie pas en puissances ; mais celle-là seulement qui ne peut être réduite au même principe, comme il a été dit plus haut.

(Somme, I.q79a10ad3)

 

Omnes illi actus quos Damascenus enumerat, sunt unius potentiae, scilicet intellectivae.

  1. Quae primo quidem simpliciter aliquid apprehendit, et hic actus dicitur intelligentia.
  2. Secundo vero, id quod apprehendit, ordinat ad aliquid aliud cognoscendum vel operandum, et hic vocatur intentio.
  3. Dum vero persistit in inquisitione illius quod intendit, vocatur excogitatio.
  4. Dum vero id quod est excogitatum examinat ad aliqua certa, dicitur scire vel sapere; quod est phronesis, vel sapientiae, nam sapientiae est iudicare, ut dicitur in I Metaphys.
  5. Ex quo autem habet aliquid pro certo, quasi examinatum, cogitat quomodo possit illud aliis manifestare, et haec est dispositio interioris sermonis;
  6. ex qua procedit exterior locutio.

Non enim omnis differentia actuum potentias diversificat; sed solum illa quae non potest reduci in idem principium, ut supra dictum est.

  

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1. -- Excogitatio : Ch. V. Héris : réflexion ; F.-X. Putallaz : invention.

2. -- Appréhension --> Intention --> Réflexion --> Jugement (oeuvre de sagesse) --> Parole intérieure --> Parole extérieure

3. -- On notera que l'appréhension est ici appelée intelligence, c'est à dire acte de l'intellect. Mais l'appréhension n'est pas le seul acte de l'intellect, celui-ci peut aussi juger, (même si, pour se faire, il est souvent besoin de faire appel aux raisonnements de la raison). Voir DeVer.q15a1ad4.

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Thomas d'Aquin - Le zèle causé par l'amour intense du bien rend odieux tout ce qui empêche ce bien de se communiquer - I-II.q28a4ad2

  • ... on n'est pas envieux du bien que tous peuvent posséder (comme Dieu ou la vérité), mais on peut l'être de la manière excellente de le posséder

Le bien est aimé en tant qu'il peut se communiquer à celui qui aime. C'est pourquoi tout ce qui empêche la perfection de cette communication, devient odieux [= devient objet de haine]. Et ainsi le zèle est causé par l'amour du bien. Mais il arrive que, par défaut de bonté, certains biens de peu de valeur (parva) ne peuvent être possédés simultanément et intégralement par plusieurs. C'est de l'amour de tels biens qu'est causée le zèle envieux.

Il n'en va pas de même, à proprement parler, quand il s'agit de ces biens que plusieurs peuvent posséder intégralement (integre), nul n'est envieux d'autrui pour la connaissance de la vérité, que plusieurs peuvent acquérir intégralement ; mais on peut peut-être l'être de l'excellence de cette connaissance.

(Somme, I-II.q28a4ad2)

Bonum amatur inquantum est communicabile amanti. Unde omne illud quod perfectionem huius communicationis impedit, efficitur odiosum. Et sic ex amore boni zelus causatur. Ex defectu autem bonitatis contingit quod quaedam parva bona non possunt integre simul possideri a multis. Et ex amore talium causatur zelus invidiae.

Non autem proprie ex his quae integre possunt a multis possideri, nullus enim invidet alteri de cognitione veritatis, quae a multis integre cognosci potest; sed forte de excellentia circa cognitionem huius.

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1. Le bien spirituel n'est pas limité par l'aspect quantitatif qui limite le bien sensible. Mais il peut être limité par la manière dont on cherche à l'atteindre, aussi certains peuvent être envieux même des choses spirituelles.

En creux, TH. nous invite à ne pas se contenter de simplement aimer le bien spirituel, mais à l'aimer intensément.

Et s'il y a amour intense, il y aura aussi un zèle

  • à atteindre le bien spirituel de la meilleure manière possible
  • et à le défendre.
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