Thomas d'Aquin - I.q105a4 - Dieu seul meut la volonté ET par ce qu'il est en lui-même (objet) ET par l'inclination qu'il suscite en nous (sujet).
Art. 4 : Est questionné si Dieu peut mouvoir la volonté : | Quarto, utrum possit movere voluntatem. |
De même que l’intellect, comme cela a été dit, est mu
ainsi la volonté est mue
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Sicut intellectus, ut dictum est, movetur
ita voluntas movetur
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[1. Du côté de l'objet] | |
Or la volonté peut être mue, à titre d’objet,
mais elle ne peut l’être d’une manière suffisante et efficace
En effet, quelque chose ne peut suffisamment mouvoir un certain mobile si la vertu active du moteur
la vertu passive du mobile. Or la vertu passive de la volonté s’étend au bien dans son universalité ; car
Mais tout bien créé
Dieu seul
C’est pourquoi lui seul
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Potest autem voluntas moveri sicut ab obiecto,
non tamen sufficienter et efficaciter
Non enim sufficienter aliquid potest movere aliquod mobile, nisi virtus activa moventis
virtutem passivam mobilis. Virtus autem passiva voluntatis se extendit ad bonum in universali,
Quodlibet autem bonum creatum
solus autem Deus
Unde ipse solus
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[2. Du côté de l'inclination = du côté du sujet] | |
De manière similaire, la faculté (virtus) volontaire est causée par Dieu seul. Vouloir, en effet,
Or incliner un être vers le bien universel appartient au premier moteur, car c’est à lui que correspond la fin ultime. Ainsi, dans les choses humaines, il appartient à celui qui préside d’orienter (dirigere) la multitude vers le bien commun. |
Similiter autem et virtus volendi a solo Deo causatur. Velle enim
Inclinare autem in bonum universale est primi moventis cui proportionatur ultimus finis, sicut in rebus humanis dirigere ad bonum commune est eius qui praeest multitudini. |
D'où,
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Unde utroque modo proprium est Dei movere voluntatem, sed maxime secundo modo, interius eam inclinando. |
1. -- Par bien universel Thomas veut dire le bien envers qui tous les autres biens sont relativisés ou encore le bien qui est entièrement un bien, un bien à qui ne manque rien de la bonté. Nous ne sommes pas en logique, Thomas ne fait pas de Dieu un concept : le bien en général, la notion (ratio) de bien. Evidemment Dieu n'est pas une abstraction, il est LE bien et le plus réel qui soit, le plus PARTICULIER qui soit. Thomas met certes en regard "particulare bonum" et "bonum universale" mais on peut entendre le mot particulier en plusieurs sens...
2. -- A PRECISER : Le mot interius est éclairant : Dieu en lui-même, de par sa bonté entière et première, de manière pour ains dire extérieure, attire à lui ; mais plus encore Dieu agit en nous, intérieurement, pour nous mettre sur une pente, une inclination, qui nous amène à "glisser" vers lui. Il faudrait voir exactement en quoi "Dieu seul" cause notre capacité volontaire. Quand ma volonté est mûe par le morceau de chocolat, en quoi est-de Dieu seul qui, en fait, la meut. On voit bien dans la premier mode comment Dieu seul peut combler (implet) la volonté... mais dans le deuxième mode... ? Un début de réponse : l'inclination est sensée être si forte en nous, que tout bien réel, effectivement exerce sur nous une attraction mais que cette capacité en nous d'être attiré ne se repose en dernier lieu qu'en Dieu seul. Chaque bien particulier met en oeuvre notre inclination, mais le seul qui nous attire fondamentalement, totalement, si nous sommes suffisammant éveillés, appauvris, c'est Dieu seul. Comme si à travers toutes les inclinations aux biens particuliers, c'est fondamentalement LE bien vers lequel nous inclinons.
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