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Thomas d'Aquin - DeVer.q23a4 - La nécessité naturelle en Dieu ne s'oppose pas à la [raison de] liberté

La volonté divine a une nécessité, non de contrainte, mais d'ordre naturel, qui ne répugne pas [= ne s'oppose pas] à la liberté.

(DeVer.q23a4)

Voluntas divina necessitatem habet, non quidem coactionis, sed naturalis ordinis, qui libertati non repugnat.

 


Sinon Dieu serait obligé de nier tout ce qu'il est pour pouvoir être libre d'être ce qu'il veut.

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Thomas d'Aquin - DeVer.q23a4adsc - La nécessité naturelle ne s'oppose pas à la liberté

La nécessité de l'ordre naturel ne répugne pas [= ne s'oppose pas] à la liberté, mais seulement la nécessité de contrainte.

(DeVer.q23a4adsc - Toute fin de la question)

 Necessitas naturalis ordinis libertati non repugnat, sed sola necessitas coactionis.

 


Important au plus haut point, sinon nous serions obligé de nier préalablement tout ce que nous sommes pour pouvoir être libre de tout ce que nous sommes.

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Thomas d'Aquin - DeVer.q24a10ad7 - Le libre arbitre ne reçoit pas le plus et le moins

Le libre arbitre,

  • en tant qu’il est dit libre de contrainte (coactione), ne reçoit pas le plus et le moins ;
  • mais s'il on considère par rapport au péché et au malheur (miseria), il est dit dans un état plus libre que dans l'autre.

(DeVer.q24a10ad7)

Liberum arbitrium,

  • secundum quod dicitur liberum a coactione, non suscipit magis et minus ;
  • sed considerata libertate a peccato et amiseria, dicitur in uno statu esse magis liberum quam inalio.

 


 1. -- En principe, le libre arbitre, comme puissance spirituelle, n'est ni limité par ce qu'il choisit, ni quantifiée par la matière. Mais du point de vue ou d'un choix antérieur qui a conduit au péché ou du conditionnement matériel de la vie concrète d'un individu, le libre arbitre peut se trouver dans un état qui ne lui permet plus d'être ce pour quoi il est fait : vouloir le bien en le choisissant. Voir le rapport inégal du libre arbitre à l'égard du bien et à l'égard du mal (III.q34a3ad1).

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Thomas d'Aquin - DeVer.q24a1ad18 - Comment la volonté est doublement non contrainte

  • De même qu'un certain vrai, du fait qu'il est non mélangé de faux, est reçu de nécessité par l'intellect,
    • comme le sont les premiers principes de la démonstration,
  • de même un certain bien, du fait qu'il est non mélangé de mal, est de nécessité désiré (appetitur) par la volonté,
    • à savoir, la félicité elle-même.

[La volonté en elle-même n'est pas contrainte, 1er point - Du côté de la fin]

Cependant, il ne s’ensuit pas que la volonté soit contrainte par cet objet ; car « contrainte »

  • dit quelque chose de contraire à la volonté
    • (qui est proprement inclination de celui qui veut)
  • et ne dit pas quelque chose de contraire à l’intellect
    • (qui ne dit pas inclination en celui qui intellige).

[La volonté en elle-même n'est pas contrainte, 2ème point- Du côté des moyens]

  • A partir de la nécessité de ce bien
    • n'est pas induit la nécessité de la volonté à vouloir d'autres choses, 
  • comme à partir de la nécessité des premiers principes
    • est induit la nécessité à l'assentiment des conclusions ;
  • les autres choses voulues n'ont pas un rapport nécessaire à ce premier voulu (ou selon la vérité ou selon l'apparence) 
    • [qui ferait en] sorte que sans eux ce premier voulu ne soit pas possible ;
  • alors que les conclusions démonstratives ont un rapport nécessaire aux principes à partir desquels elles sont démontrées, 
    • si bien que, les conclusions n'étant pas vraies, il est nécessaire que les principes ne soient pas vrais.

(DeVer.q24a1ad18)

  • Sicut aliquod verum est quod propter impermixtionem falsi de necessitate ab intellectu recipitur,
    • sicut prima principia demonstrationis;
  • ita est aliquod bonum quod propter malitiae impermixtionem de necessitate a voluntate appetitur,
    • scilicet ipsa felicitas.

[ ]

Non tamen sequitur quod ab illo obiecto voluntas cogatur; quia coactio 

  • dicit aliquid contrarium voluntati,
    • quae est proprie inclinatio volentis ;
  • non autem dicit aliquid contrarium intellectui,
    • qui non dicit inclinationem intelligentis.

[ ]

  • Nec ex necessitate illius boni
    • inducitur necessitas voluntatis respectu aliorum volendorum,
  • sicut ex necessitate primorum principiorum
    • inducitur intellectui necessitas ad assentiendum conclusionibus ;
  • eo quod alia volita non habent necessariam habitudinem ad illud primum volitum vel secundum veritatem vel secundum apparentiam,
    • ut scilicet absque illis primum volitum haberi non possit;
  • sicut conclusiones demonstrativae habent necessariam habitudinem ad principia ex quibus demonstrantur,
    • ita quod, conclusionibus non existentibus veris, necesse est principia non esse vera.

 

 


1. -- Extraordinaire : du fait que le bonheur est un bien dans lequel on ne trouve aucun mal, il en peut qu'être nécessairement désiré.

2. -- Sur l'argument du côté de la fin : Le bonheur ne contraint pas la volonté à le vouloir, parce que la volonté est faite pour cela. Non seulement il n'y a pas contrainte, mais désirer le bonheur accomplit la volonté puisqu'elle a en elle-même une inclination au bonheur (elle tend naturellement à cela, elle ne peut faire autrement, comme voir n'est pas une contrainte pour l'oeil). C'est opurquoi, en d'autres lieux, TH. dira que la nécessité n'est pas contraire à la liberté mais seulement la contrainte.

3. -- Sur l'argument du côté des moyens : Le premier vrai et le premier bien servent de premier appui, l'un dans le domaine spéculatif l'autre dans le domaine pratique. Mais alors que ce qui en découle est nécessaire sur le plan spéculatif, cela n'est pas le cas sur le plan pratique. Ainsi, si les conclusions s'imposent d'elles-mêmes à partir des premiers principes (le premier vrai) sur le plan spéculatif, les moyens, eux, ne s'imposent pas à partir du premier bien (le premier bien, désir du bonheur) sur le plan pratique.

4. -- Remarque sur "« contrainte » (...) ne dit pas quelque chose de contraire à l’intellect, qui ne dit pas inclination en celui qui intellige". En effet, car l'intellect n'est pas déterminé à intelliger quelque chose en particulier, alors que la volonté en elle-même est "programmée" à vouloir le bonheur.

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Thomas d'Aquin - DeVer.q24a2ad3 - Les actions peuvent être empêchées, on n'est donc pas libre de son action

Les actions, étant exercées par le corps, peuvent être contraintes ou empêchées non seulement chez les bêtes, mais aussi chez les hommes, et c’est pourquoi on ne dit pas même de l’homme qu’il est libre de son action. 

(DeVer.q24a2ad3)

Actiones, cum per corpus exerceantur, cogi possunt vel prohiberi, non solum in brutis, sed in hominibus, unde nec ipse homo dicitur liber actionis suae.

 


Parce que nous sommes des êtres corporels appartenant au monde physique, les conséquences d'un choix peuvent ne pas s'appliquer. La liberté est avant tout interne et n'a pas besoin de voir les actions réellement efféctuées pour exister.

 Voir aussi DeVer.q24a1ad1.q24a1ad1

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Thomas d'Aquin - I.q59a3ad3 - La liberté en soi étrangère à la contrainte vs le libre arbitre exercée à travers notre conditionnement

  • ... qui, lui, peut subir des contraintes

Le libre arbitre, chez les anges supérieurs, existe sur un mode plus noble que chez les [hommes] inférieurs, comme [c'est le cas] aussi pour le jugement de l'intellect.

[Cependant,] il est vrai que la liberté elle-même (ipsa libertas)

  • selon qu'est considérée en elle un certain rejet (quaedam remotio) de la contrainte (coactionis),
    • ne soutient pas de plus ou de moins,
      • parce que toute privation et toute négation ne peuvent être diminuées ou augmentées par elles-mêmes (per se),
  • mais [soutient le plus ou le moins] seulement
    • par sa cause (per suam causam),
    • ou selon que quelque affirmation est adjointe.

(Somme, I.q59a3ad3)

Liberum arbitrium nobiliori modo est in superioribus angelis, quam in inferioribus, sicut et iudicium intellectus.

Verum est quod ipsa libertas,

  • secundum quod in ea consideratur quaedam remotio coactionis,
    • non suscipit magis et minus,
      • quia privationes et negationes non remittuntur nec intenduntur per se,
  • sed solum
    • per suam causam,
    • vel secundum aliquam affirmationem adiunctam.

 

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1. -- On considère dans la liberté une certaine opposition à la contrainte. Est-ce là la trace de la réserve que TH. va mentionner plus bas ?

2. -- TH. parle dans un premier temps du libre arbitre pour dire qu'il existe sur un mode supérieur chez l'ange comparativement au mode selon lequel il existe chez l'homme.

Puis il apporte une nuance en ne parlant plus cette fois-ci du libre arbitre lui-même mais du terme abstrait "liberté". Il peut alors dire que la liberté en elle-même (ipsam libertas) est étrangère à la contrainte parce qu'il considère la raison de liberté, la notion de liberté, en elle-même, dans sa pureté conceptuelle.

Ensuite il ne la considère plus en elle-même, mais selon sa cause (per suam causam). Quelle est la cause de la liberté ? C'est bien notre capacité à juger que telle chose est un bien, que telle chose est un moyen efficace pour parvenir à la fin. C'est le mot "affirmation" que Thomas utilise ici, une affirmation est un jugement. Or, notre jugement peut être altéré, c'est alors que notre libre arbitre (c'est à dire la liberté dans son exercice concret, non plus considérée seulement en elle-même), dans son exercice, peut soutenir le plus et le moins. L'expérience le montre, grâce à nos efforts, à la qualité de notre application, la qualité de nos jugements et de ses conséquences pratiques s'améliorent dans le temps et nous devenonspar là de plus en plus libre effectivement.

Première version de mon commentaire : Autant la notion de liberté n'implique pas le plus et le moins, autant l'exercice de notre libre arbitre se fait à travers notre conditionnement (psychologique, moral, culturel, corporel, etc.... et simplement par le fait que nous devenons de plus en plus humain). Par là-même, cet exercice est susceptible d'être plus ou moins libre.

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