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Thomas d'Aquin - La fatigue des opérations corporelles empêchent le plaisir de la contemplation de les perfectionner - I-II.q33a2

Les délectations du corps, par leur augmentation ou leur seule continuité, super-excèdent la disposition naturelle et engendrent le dégoût (fastidiosae), comme on le voit pour la délectation de manger. C'est pourquoi, lorsqu'on est parvenu à la perfection dans les plaisirs corporels, ils nous dégoûtent et, parfois, on a l'appétit de quelques autres [délectations].

Mais les déléctations spirituelles ne super-excèdent jamais la disposition naturelle (naturalem habitudinem) ; mais ils perfectionnent la nature. Aussi, lorsqu'on parvient à l'accomplisement en eux, c'est alors qu'ils sont le plus agréables (delectabiles) ; sauf peut-être par accident, du fait qu'à l'activité contemplative sont unies (adiunguntur) quelques opérations des puissances corporelles qui sont fatiguées (lassantur) par la prolongation de leur activité.

(Somme, Ia-IIae, q33a2)

Delectationes enim corporales, quia augmentatae, vel etiam continuatae, faciunt superexcrescentiam naturalis habitudinis, efficiuntur fastidiosae; ut patet in delectatione ciborum. Et propter hoc, quando aliquis iam pervenit ad perfectum in delectationibus corporalibus, fastidit eas, et quandoque appetit aliquas alias.

Sed delectationes spirituales non superexcrescunt naturalem habitudinem, sed perficiunt naturam. Unde cum pervenitur ad consummationem in ipsis, tunc sunt magis delectabiles, nisi forte per accidens, inquantum operationi contemplativae adiunguntur aliquae operationes virtutum corporalium, quae per assiduitatem operandi lassantur.

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1. Que les biens et les plaisirs corporels soient dans la nécessité naturelle de se limiter à une certaine mesure pour rester des biens et des plaisirs est également abordé en I-II.q32a7.

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Thomas d'Aquin - EN COURS - CommNico.1543 - Les amis n'ont pas besoin de justice

(1155a26)

Il présente ensuite la cinquième raison.

Il dit que

  • si des gens sont amis,
  • ils n'auront en rien besoin de la justice proprement dite,
  • parce qu'ils auront toutes choses quasi en commun,
  • puisque l'ami est un autre soi-même ;
  • or il n'y a pas de justice envers soi-même.

Tandis que

  • s'ils sont justes,
  • ils auront néanmoins besoin de l'amitié entre eux.

Même que ce qui est le plus juste paraît être conservateur et réparateur de l'amitié. Il relève donc beaucoup plus du moraliste de porter attention à l'amitié qu'à la justice.

Et cela même qui est au plus au point juste semble être conservateur et réparateur (ou revivifier ou renouveler ???) de l'amitié. Donc, il est bien plus pertinent que la morale considère l'amitié plutôt que la justice.

(Commentaire Ethique à Nicomaque,  n°1543)

Sententia Ethic., lib. 8 l. 1 n. 6

Quintam rationem ponit ibi, et amicis quidem et cetera.

Et dicit quod,

  • si aliqui sint amici,
  • in nullo indigerent iustitia proprie dicta,
  • quia haberent omnia quasi communia,
  • cum amicus sit alter ipse;
  • non est autem iustitia ad seipsum.

Sed

  • si sint iusti,
  • nihilominus indigent amicitia adinvicem.

Et illud quod est maxime iustum videtur esse conservativum et reparativum amicitiae. Multo ergo magis ad moralem pertinet considerare de amicitia quam de iustitia.

 

 

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Aide de ChatGPT : 

Bien sûr, je peux décomposer cette phrase pour vous.

“Et illud quod est maxime iustum videtur esse conservativum et reparativum amicitiae.”

En anglais, cela se traduit par :

“And that which seems most just appears to be conservative and restorative of friendship.”

Voici une explication détaillée de chaque partie :

“Et illud quod est maxime iustum” : Cette partie signifie “And that which is most just”. Elle fait référence à quelque chose qui est considéré comme le plus juste ou le plus équitable.
“videtur esse conservativum” : Cette partie se traduit par “seems to be conservative”. Elle suggère que ce qui est le plus juste a tendance à être conservateur, c’est-à-dire à maintenir l’état actuel des choses.
“et reparativum amicitiae” : Cette partie signifie “and restorative of friendship”. Elle indique que ce qui est le plus juste a également la capacité de restaurer ou de réparer l’amitié.
Donc, dans l’ensemble, la phrase suggère que ce qui est le plus juste non seulement conserve l’état actuel des choses, mais a aussi le pouvoir de restaurer l’amitié. J’espère que cela vous aide à mieux comprendre la phrase. Si vous avez d’autres questions, n’hésitez pas à me le faire savoir! 😊

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Thomas d'Aquin - I-II.q38a1 - La tristesse est un état "non naturel", maladif, qui fatigue

  • La tristesse fatigue, elle est comme une maladie de l'appétit

... D'où

  • comme la délectation [= plaisir, joie] est à l'égard de la tristesse
    • dans les mouvements de l’appétit,
  • ainsi ce qu'est le repos à la fatigue
    • dans les mouvements corporels,

[fatigue] qui provient de quelque transmutation non naturelle (innaturali), car la tristesse elle-même

  • [implique] une certaine fatigue
  • ou implique (importat) un état maladif de la puissance appétitive

(Somme, I-II.q38a1) 

... Unde

  • sic se habet
    • delectatio ad tristitiam
    • in motibus appetitivis,
  • sicut se habet
    • in corporibus
    • quies ad fatigationem,

quae accidit ex aliqua transmutatione innaturali, nam et ipsa tristitia

  • fatigationem quandam,
  • seu aegritudinem appetitivae virtutis importat.

La tristesse fatigue car elle est le signe que le bien désiré n'a pas été atteint, cette incomplétude de l'appétit plonge dans la division qui fatigue.

D'une certaine manière, ce n'est pas naturel d'être triste, nous ne sommes pas fait pour cela. La tristesse est comme un état de violence pour l'appétit.

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Comme si Thomas disait qu'il y a quelque chose dans la nature de naturellement non naturel, comme si la nature jouait naturellement contre elle-même. La fatigue est naturelle, mais du point de vue de ce que doit être le mouvement musculaire d'un individu dans son état de pleine forme, elle représente quelque chose qui s'oppose à la nature, de la même manière qu'un appétit qui ne trouve pas son terme quitte d'une certaine manière l'ordre naturel des choses.

Du côté de la joie, nous admettons qu'elle nous donne une grande force pour agir, contrairement à la tristesse qui n'est pas amie de l'action.

Analogiquement, on parlera donc d'un appétit fatigué. On dira que la tristesse produit les mêmes effets dans la dimension appétitive de notre être que la fatigue physique dans le corps : l'arrêt ou la diminution du mouvement. Comme la fatigue empêche l'exercice physique, la tristesse empêche la re-mise en mouvement vers un bien extérieur à atteindre.

Thomas termine en disant que cette fatigue de l'appétit pourrait aussi se comprendre par le terme de "maladie", la tristesse serait ainsi une maladie de l'appétit.

Après avoir dit ce qu'elle était (ce que nous ressentons en l'absence du bien), Thomas se livre ici à une forme de description expérimentale, presque psychologique, de la tristesse.

Être triste est fatiguant.

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Thomas d'Aquin - La division en l'homme du fait de sa nature composée - Le cas de la contemplation - CommNico.1534

C'est pourquoi,

  • si l'homme, selon une certaine de ses dispositions, pose une action délectable pour lui,
  • cette délectation est hors de sa nature pour l'homme selon une autre de ses dispositions.

Ainsi,

  • contempler est naturel à l'homme en raison de l'intellect,
  • mais hors de sa nature en raison des organes de l'imagination, qui travaillent tandis qu'il contemple.

C'est pourquoi la contemplation n'est pas toujours délectable à l'homme. Et cela est similaire pour la consommation  de nourriture, qui est naturelle au corps qui a faim, mais hors de sa nature pour le corps déjà repu.

(Commentaire Ethique à Nicomaque,  n°1534)

Et ideo,

  • si homo secundum aliquam sui dispositionem agat aliquam actionem sibi delectabilem,
  • haec delectatio est praeternaturalis homini secundum alteram eius dispositionem.

Sicut

  • contemplari est naturale homini ratione intellectus,
  • sed est praeternaturale homini ratione organorum imaginationis, quae laborant in contemplando.

Et ideo contemplatio non est semper homini delectabilis. Et est simile de sumptione cibi quae est naturalis corpori indigenti, praeter naturam autem corpori iam repleto.

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1. C'est pourquoi celui qui a un désir intense de contempler verra son corps moins rapidement à la traine de la partie spirituelle même après une longue période de contemplation. Mais arrivera un moment où le corps ne pourra plus suivre.

2. Noter combien Thomas est réaliste puisqu'il n'isole pas du corps l'activité de l'intellect. Thomas parle ici davantage de la contemplation naturelle, philosophique. Il faudrait comparer avec ce qu'il dit dans le cas de la contemplation dont le contenu vient de la foi.

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